• 2 interviews de l'auteurs !!

    Interview de Fabien Vehlmann parue dans le Journal de Spirou n° 3867 du 23 mai 2012.

     

    Le 1er juin sortira le tome 7 de Seuls, intitulé Les Terres basses. Un album très spécial, puisque de nouveaux personnages y apparaîtront, basés sur le physique des vainqueurs du grand concours Seuls. Une expérience éditoriale inédite, sur laquelle revient Fabien Vehlmann.

     

    Le 30 août dernier, le grand concours SEULS se terminait. Tu en tires quel constat ?

    VEHLMANN : 20.000 participants. Plus de 2 500 clans créés. Bref : un vrai bonheur! Tanguy, le grand gagnant, est devenu un personnage à part entière de la série (il apparaît en page 17 de ce SPIROU). Les cinq gagnants suivants y apparaitront, eux, en tant que figurants (on peut les voir en page 19 de ce numéro). Bien sûr, ce concours m’a imposé un mode d’écriture un peu périlleux, car je savais qu’il me faudrait attendre la fin, et donc l’identité des vainqueurs, pour pouvoir les intégrer à mon histoire, ce qui risquait de me mettre très en retard ! Afin de limiter les risques, j’avais toutefois écrit très tôt le début des Terres basses, prévoyant de ne faire intervenir les nouveaux personnages qu’à la fin de l’intrigue.

     

    Créer un personnage à partir d’un lecteur que tu ne connais pas n’a pas été trop compliqué ?

    VEHLMANN : Ah, mais j’ai suivi très régulièrement ce qui se passait sur le site du concours, afin de bien connaître les participants, et j’ai posé des questions précises à chacun des gagnants afin de me faire une idée de leurs caractères respectifs. Je leur ai demandé par exemple quelles épreuves physiques et intellectuelles ils aimeraient voir imposées à leur personnage... Pourquoi ? Tout simplement parce qu’il y en aura beaucoup dans le futur tome 8... Je tenais à impliquer les enfants dans le scénario de SEULS, car

    moi, si on m’avait proposé ce genre de collaboration à leur âge, ça aurait été un

    rêve éveillé ! Gamin, j’aurais tout donné pour être figurant dans "Star Wars"!

     

    Quelques petites révélations sur l’avenir de la série ?

    VEHLMANN : Ça va dézinguer ! L’histoire est arrivée à un point où je dois choisir les personnages qui vont partir. Je n’en dis pas plus. Car je veux que le lecteur puisse toujours envisager que je lui réserve le pire... Pas question de laisser retomber la tension !

     

     

     

    Et une autre interview  :



     

    VEHLMANN : « J'adore partir d'un cliché pour le détourner ! »

     

    Revoilà Dodji, Leïla et toute la bande! Dans Les Terres basses, nos amis vont devoir faire face à un nouveau péril : la zone rouge semble s'enfoncer inexorablement... Cela valait bien une conversation avec les créateurs de Seuls, le scénariste Fabien Vehlmann et le dessinateur Bruno Gazzotti...

     

     

     

    D'où est née cette idée de cette partie de Fortville qui s'enfonce ?

     

     

     

    VEHLMANN: C'est venu de l'image d'une espèce de Tour de Babel à l'envers, en fait... Mais je ne peux pas en dire trop pour ne pas déflorer la surprise! Disons que j'ai eu envie d'impressionner le lecteur avec un élément nouveau et plutôt effrayant. Car cette idée de s'enfoncer dans le sol est assez angoissante et, on le découvrira par la suite, aura des connotations presque mythologiques.

     

     

     

    GAZZOTTI : Au départ, j'ai trouvé cette idée assez bizarre mais puissamment originale ! Mais cette fois, je n'ai pas trop souffert pour la mettre en scène : dessiner une falaise et des rochers, ce n'est pas un énorme défi graphique. Et sur le plan de la perspective, je dois dessiner les bâtiments plus hauts, mais il n'y a quand même qu'un seul point de fuite, ce n'est donc pas trop casse-tête.

     

     

     

    Parmi les nouveautés de ce tome 7, il y a cette créature qui, contrairement aux vampires, n'apparaît que dans les miroirs...

     

     

     

    GAZZOTTI : La genèse de ce personnage est amusante : il est né d'une erreur de ma part! Dans le cinquième épisode, quand nos héros s'éjectent de la voiture qui fonce dans le décor, j'ai failli dessiner une main en trop en bord du cadre... Et je me suis dit : Tiens! Ce serait marrant d'évoquer un personnage supplémentaire dans la zone rouge, une sorte de fantôme dont les lecteurs peuvent sentir la présence de manière quasi subliminale... Et lorsqu'il s'est agi, dans cet épisode-ci, de le montrer un peu plus, je l'ai créé assez facilement : édenté, maigre, avec des bandelettes autour du corps comme dans le film La Momie...

     

     

     

    VEHLMANN: Certains lecteurs attentifs de la série pressentaient l'existence de cette créature ; ils en parlaient comme de “l'Enfant-mystère”. Au départ, je ne savais pas trop comment utiliser l'idée de Bruno et puis je me suis rendu compte que cela pouvait être assez excitant de proposer une “sous-lecture” à ceux qui suivent la saga, de leur suggérer une présence dont on ne se rend pas compte tout de suite. Cela ajoute un plaisir de lecture quand on a été “initié” par des amis qui ont détecté les indices dans les tomes 5 et 6... Et cette fois, cette créature apparaît, mais uniquement dans les reflets.

     

     

     

    La troupe de Saul a une attitude “zombique”. Les zombies, comme les vampires, c'est un grand cliché. Comment le renouveler ?

     

     

     

    VEHLMANN: Ce que j'adore dans Seuls comme dans d'autres de mes séries, c'est de partir du cliché pour ensuite le détourner. Je ne fais que suivre le conseil d'Hitchcock ; il disait qu'il valait mieux partir du cliché pour tenter de le renverser plutôt que d'essayer de croire que le cliché n'existe pas et finir, après moult cogitations, par retomber dessus! Ici, la référence aux zombies est claire et, en même temps, ce que j'aimais bien, c'est cette espèce de nonchalance tranquille qu'on peut ressentir chez ces enfants... En fait, plus qu'aux zombies menaçants des films d'horreur, j'ai repensé aux Schtroumpfs noirs – que je mentionne d'ailleurs : c'est un de mes grands souvenirs d'enfance, avec cette histoire où l'ancien ami devient l'ennemi !

     

     

     

    GAZZOTTI : J'ai lu un guide humoristique intitulé Comment survivre aux zombies, qui reprend tous les clichés du genre. On a l'habitude de voir les zombies marcher lentement, l'air hébété, les bras ne suivant pas le rythme des pas... Dans les récits pour adultes, on montre souvent les zombies avec les bras tendus. Moi j'ai plutôt choisi de dessiner ces enfants un peu penchés en avant et les bras ballants. Ça me semblait une bonne manière de traduire leur état zombique sans sombrer dans quelque chose de trop violent...

     

     

     

    Tant qu'à parler de violence, il y a cette scène où Saul leur tire dessus...

     

     

     

    GAZZOTTI : Fabien se demandait comment désamorcer la violence de cette scène. Je lui ai suggéré que Saul prononce les prénoms de ceux qu'il abat ; ça dédramatise son geste. Et puis il y a sa réplique : « Si ça se trouve, c'est le seul moyen de les sauver. » Il faut réfléchir en permanence et trouver des astuces pour

     

    tempérer la tension de certaines scènes. H.D.

     

     

     

    (Interview réalisée pour Le Journal de Spirou, n° 3864)